A compter du 1er juillet 2014, seules les opérations d’économies d’énergie réalisées dans le cadre d’entreprises titulaires d’une certification complète ISO 50001 pourront permettre de bénéficier de Certificats d’Économies d’Énergie (CEE) bonifiés. A l’approche de cette échéance, nous vous proposons de revenir sur les principales spécificités de cette norme, appelée à devenir l’outil de référence internationale pour la mise en place d’un système de management de l’énergie (SMÉ), et dont la mise en place nécessite notamment une veille réglementaire ciblée.
Management de l’énergie : la certification ISO 50001 pourquoi faire ?
La norme ISO 50001 définit un cadre et des lignes directrices pour la mise en œuvre d’un SMÉ suivant le modèle d’amélioration continue PDCA1 déjà appliqué dans le cadre de l’ISO 9001 (Qualité), de l’ISO 14001 (Environnement) ou encore de l’OHSAS 18001 (Santé/Sécurité au travail). En synthèse, sur la base d’une revue énergétique initiale et des exigences légales applicables, l’entreprise doit définir ses consommations de référence et ses usages énergétiques significatifs, établir des objectifs et cibles déclinés en plans d’actions, puis suivre l’évolution de ses performances à partir d’indicateurs et d’un plan de mesure de l’énergie.
L’ISO 50001 peut ainsi être mise en œuvre seule, ou intégrée aux autres systèmes de management déjà en place dans l’entreprise. C’est l’une des raisons du succès immédiat de cette norme depuis sa publication fin 2011. De fait, à fin avril 2014, 7 100 sites étaient déjà certifiés à travers le monde, dont près de 1 000 en France répartis sur 70 entreprises2. Mais ce succès rapide s’explique d’abord et avant tout par les multiples bénéfices pouvant résulter de la mise en œuvre d’un système de management de l’énergie suivant la norme ISO 50001, au nombre desquels :
- l’amélioration de la rentabilité et de la compétitivité à travers les économies d’énergie réalisées et la réduction des coûts associés
- la diminution de la vulnérabilité de l’entreprise par rapport aux évolutions du marché de l’énergie, et la sécurisation de ses approvisionnements
- une capacité d’anticipation renforcée vis-à-vis des futures contraintes réglementaires liées à l’énergie et aux émissions de GES
- la possibilité pour les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire d’être exemptées d’audit énergétique tous les 4 ans en application de l’article L. 233-1 du Code de l’énergie, le premier audit étant, en principe, à réaliser avant le 5 décembre 20153
Enfin, dernier avantage et non des moindres d’un point de vue financier, les opérations d’économies d’énergie réalisées dans le périmètre d’une certification ISO 50001 donnent lieu à la délivrance de CEE bonifiés pour les fournisseurs d’énergie4 tenus de réaliser ou de faire réaliser à leurs clients un volume minimum d’économies d’énergie sous peine de pénalités financières. Ainsi, en aidant des entreprises certifiées ISO 50001 à mettre en œuvre des opérations d’économies d’énergie au niveau de leurs sites industriels ou bâtiments tertiaires5 , le fournisseur d’énergie bénéficie d’une bonification sur le montant de CEE correspondant aux kWh économisés. Par voie de conséquence, sa contribution au financement et à la réalisation du projet s’en trouve évidemment relevée.
Pour les opérations engagées jusqu’au 30 juin 2014, le montant de CEE est bonifié de + 50% si l’entreprise bénéficiaire a atteint le niveau 1 de certification, à savoir la mise en place du système de management de l’énergie jusqu’à la formalisation du plan d’actions. Il est doublé (+ 100%) en cas de certification complète ISO 50001. Pour les opérations engagées à compter du 1er juillet 2014, seule la bonification de 100% associée à une certification complète ISO 50001 sera donc maintenue.
Quelles sont les spécificités de la norme ISO 50001 ?
Comme indiqué plus haut, la structure de l’ISO 50001 est comparable à celles de l’ISO 14001 ou de l’OHSAS 18001. Système de Management de l’énergie :
La norme ISO 50001 comporte toutefois quelques spécificités notables :
- L’engagement de la direction dans la mise en œuvre du système de management de l’énergie est davantage caractérisé dans le cadre d’un chapitre dédié (4.2.1)
- Les activités de conception d’installations, équipements ou procédés pouvant avoir un impact significatif sur la performance énergétique doivent obligatoirement être prises en compte dans le système de management de l’énergie (Chapitre 4.5.6), ce que n’impose pas l’ISO 14001 notamment
- Un chapitre spécifique (4.5.7) est prévu pour encadrer les opérations d’achat liées à l’énergie. Il impose notamment de définir des spécifications d’achat d’énergie et d’établir des critères d’évaluation énergétique lors de l’achat de certains produits, équipements ou services consommateurs d’énergie
- La norme ISO 50001 s’inscrit dans une logique de résultats, et pas uniquement de moyens. Elle exige ainsi de comparer les évolutions de la performance énergétique aux consommations de référence établies à partir de la revue énergétique initiale (Chapitres 4.4.4 et 4.4.5). De plus, les méthodes permettant de vérifier les résultats des plans d’actions et leurs incidences en terme d’amélioration de la performance énergétique doivent être décrites (Chapitre 4.4.6)
Comment gérer la veille réglementaire au titre de l’ISO 50001 ?
Au même titre que l’ISO 14001 ou l’OHSAS 18001, l’ISO 50001 exige la mise en place d’une veille réglementaire spécifique permettant :
- d’identifier et mettre en œuvre les exigences légales se rapportant au système de management de l’énergie (§ 4.4.2)
- d’évaluer sa conformité à ces exigences légales (§ 4.6.2).
Concrètement, la veille réglementaire Énergie réalisée au titre de la norme ISO 50001 doit permettre à l’entreprise d’identifier et de suivre les évolutions de toute réglementation en lien avec ses « usages énergétiques » (Ex. : ventilation, éclairage, chauffage, refroidissement, procédés de production…), sa « consommation énergétique » (= quantité d’énergie utilisée) ou son « efficacité énergétique » (= ratio résultats/apports en énergie).
Inévitablement, le périmètre de veille ainsi défini recouvre plusieurs textes susceptibles de relever également de l’ISO 14001. C’est notamment le cas des réglementations concernant le bilan des émissions de gaz à effet de serre, les chaudières et systèmes de climatisation, les sources de pollution lumineuse, ou encore les rubriques ICPE liées aux activités de production/consommation d’énergie. Ce constat est logique puisque la norme ISO 14001 traite aussi de l’énergie, parmi d’autres aspects environnementaux.
Pour autant, la norme ISO 50001 aborde l’énergie de manière exclusive et sous un angle spécifique. De ce fait, les entreprises ayant déjà mis en place une veille réglementaire environnementale dans le cadre de la norme ISO 14001, doivent nécessairement revoir et, le cas échéant, compléter :
- les sources de veille => Le code de l’énergie, ainsi que le code de la construction et de l’habitation, rassemblent notamment une part importante des exigences légales inscrites dans le périmètre de l’ISO 50001
- la liste des exigences légales considérées comme applicables, afin d’y inclure des dispositions non nécessairement suivies dans le cadre d’une veille ISO 14001, comme celles concernant la réglementation thermique des bâtiments, l’écoconception de produits liés à l’énergie, les CEE ou encore les conditions d’approvisionnement et de raccordement aux réseaux d’électricité et de gaz
- le classement des exigences légales sélectionnées et suivies, afin notamment de pouvoir repérer aisément celles relevant de l’ISO 50001.
A noter que certains textes du domaine de la santé/sécurité au travail concernent aussi indirectement les usages, la consommation et/ou l’efficacité énergétique(s) des entreprises. Tel est le cas, par exemple, des articles du Code du travail imposant des contraintes d’éclairage ou de ventilation des locaux de travail. De telles exigences relèvent aussi de la veille réglementaire Énergie au sens de l’ISO 50001. De même, l’air comprimé et la vapeur étant cités parmi les formes d’énergie à prendre en compte dans la norme ISO 50001, les textes relatifs aux équipements sous pression sont à englober dans le périmètre6.
Enfin, d’un point de vue méthodologique, l’organisation d’une veille réglementaire au titre de l’ISO 50001 ne diffère pas fondamentalement de la démarche qui peut être menée dans le cadre de l’ISO 14001 ou de l’OHSAS 18001. Même si l’ISO 50001 n’exige pas expressément la formalisation d’une procédure de veille, à la différence des 2 autres référentiels, toute entreprise se lançant dans la démarche doit néanmoins disposer d’une organisation et de méthodes pour pouvoir :
- s’appuyer sur des sources de veille adaptées
- sélectionner uniquement des textes pertinents
- définir l’applicabilité de chaque exigence à l’intérieur des textes
- lier les différentes exigences applicables aux installations/services concernés
- respecter une fréquence de veille minimale
- mettre à jour les textes au fur et à mesure de leurs modifications successives.
1 Plan – Do – Check – Act => Planifier – Faire – Vérifier – Agir
2 Source : German Institute for Standardization (DIN) : http://www.nagus.din.de. Les entreprises Dalkia et Carrefour regroupent plus de 85% des sites certifiés en France.
3 Disposition non applicable aux PME employant moins de 250 personnes et/ou dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 M€ ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 M€
4 En tant qu’ « obligés » ces fournisseurs (Distributeurs d’électricité, gaz, chaleur/froid, fioul domestique ou carburants) doivent justifier des économies d’énergie réalisées en présentant les CEE correspondants
5 Exemples : Mesures d’isolation des bâtiments, installation d’équipements économes (récupérateur de chaleur sur compresseur d’air, moteur ou transformateur à haut rendement, blocs autonomes d’éclairage de sécurité à faible consommation, systèmes automatiques de pilotage, d’extinction et/ou de veille etc.)
6 Au sens de la norme ISO 50001, le terme « énergie » recouvre toutes les formes d’énergie, y compris renouvelables, pouvant être achetées, stockées ou utilisées dans des équipements ou procédés, à savoir notamment l’électricité, les combustibles fossiles ou non fossiles, la vapeur, la chaleur et l’air comprimé.