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Réglementation HSE

Travail isolé : comment prévenir les risques ?

Le travail isolé est une nécessité pour de nombreuses entreprises. Néanmoins, l’isolement des travailleurs constitue un facteur de risque aggravant en cas d’incident. Quelles mesures mettre en place ? On fait le point dans cet article.

 

Travail isolé
631887082 @Joseph Maniquet

 

Qu’est-ce que le travail isolé ?

Le travail est considéré comme isolé lorsque le travailleur est hors de vue ou de portée de voix d’autres personnes et sans possibilité de recours extérieur et que le travail présente un caractère dangereux.

Cet extrait de la recommandation R416 de la CPAM sert de définition pour définir les contours du travail isolé.

Ainsi, trois caractéristiques définissent le travail isolé :

  • l’impossibilité d’être vu ou de se faire entendre des autres travailleurs ;
  • l’absence d’aide extérieure ;
  • la dangerosité du travail.

⚠️ Attention : Même un isolement de courte durée doit être considéré comme du travail isolé.

Que ce soit pour des raisons pratiques, de sécurité ou par contrainte des conditions de travail, de nombreux secteurs d’activité ont recours au travail isolé, en particulier :

  • les hôpitaux ;
  • l’agroalimentaire ;
  • le BTP ;
  • la maintenance ;

Notez-le : Selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), en 2014, la France comptait environ 3 millions de travailleurs isolés tous secteurs confondus.

 

Quels sont les risques du travail isolé ?

Le risque principal du travail isolé est l’absence de secours en cas d’accident du travail.

En effet, l’isolement du travailleur crée une impossibilité pour ce dernier à prévenir les secours ou à obtenir une aide extérieure en cas d’incident.

🔍 Focus : Le risque du travail isolé est amplifié pour les métiers à risques particuliers tels que les travaux en espace confiné ou les travaux en hauteur.

Par ailleurs, le travail isolé expose les travailleurs à des risques psychosociaux notamment dus à l’appréhension d’être livré à soi-même ou l’ennui et la solitude pour certains postes (notamment les postes de surveillance).

 

Quelle est la réglementation du travail isolé ?

Comme pour tous les risques professionnels, la réglementation impose à l’employeur (Article L4121-1 C.Trav.) :

  • de mener des actions de prévention des risques professionnels ;
  • de mener des actions d’information et de formation ;
  • de mettre en place une organisation et des moyens adaptés.

Au-delà de ces règles générales, la réglementation fixe des règles applicables à certains travaux isolés bien précis.

Ainsi, dans le cas de travaux réalisés par une entreprise extérieure et lorsque l’opération est réalisée de nuit, dans un lieu isolé ou à un moment ou l’activité de l’entreprise utilisatrice est interrompue, le chef de l’entreprise extérieure doit s’assurer qu’aucun travailleur ne travaille isolément à un endroit où il ne pourrait être rapidement secouru (article R4512-13 C. Trav.)

Par ailleurs, il existe plusieurs interdictions pour les travailleurs isolés qui effectuent des travaux de maintenance et d’entretien d’équipements élévateurs installés à demeure (ascenseurs, monte-charges, escalators, trottoirs roulants, etc.) et notamment le port manuel d’une masse supérieure à 30 kg ou la pose ou la dépose des câbles de traction d’ascenseur (Article R4543-20 C.Trav.).

🔍 Focus : Pour plus d’informations, n’hésitez pas à consulter la partie du Code du travail dédiée aux travaux de maintenance d’équipements élévateurs.

Enfin, pour certaines tâches ou travaux à risques particuliers, il est interdit que les travailleurs restent seuls ou sans surveillance, c’est notamment le cas pour :

 

Comment prévenir les risques liés au travail isolé ?

Évaluation des risques

L’évaluation des risques vise d’abord à identifier tous les postes de travail isolé et toutes les situations de travail dans lesquelles des travailleurs se trouvent isolés.

Cette identification doit prendre en compte toutes les circonstances, les conditions de travail et les éléments qui pourraient participer à l’isolement des travailleurs (bruit ambiant, obstacles visuels, distances avec les autres travailleurs, indépendance du poste, fréquence de passage, etc.).

Le poste de travail ainsi que les tâches à accomplir doivent également être définis précisément afin de pouvoir déterminer les risques qui y sont associés.

Ensuite, afin de déterminer au mieux les mesures de prévention qui devront être prises, l’évaluation des risques du travail isolé doit définir précisément les caractéristiques de l’isolement, à savoir :

  • l’isolement géographique ;
  • l’isolement visuel ;
  • l’isolement sonore ;
  • la durée de l’isolement ;

Enfin, les caractéristiques personnelles des travailleurs tels que le sexe, l’âge ou l’ancienneté jouent un rôle important dans la prévention des risques et doivent ainsi être pris en compte dans cette évaluation.

🔍 Focus : à titre illustratif, dans ce cas de jurisprudence, un travailleur trouve la mort lors d’une chute d’un poteau sur un chantier. Le travailleur était seul et travaillait à l’aide d’un baudrier. L’isolement du travailleur est mis en cause (Cass. crim. 3 novembre 1998, n° 97-85.236).

 

Mesures de prévention

La prévention des risques du travail isolé s’appuie principalement sur :

•       la surveillance des travailleurs isolés ;

•       la mise en place d’un système d’alerte en cas d’accident ;

•       l’organisation des secours.

Il est possible dans un premier temps de mettre en place des mesures organisationnelles qui permettent de limiter le travail isolé ou d’en diminuer les risques : réorganiser le poste de travail ou son environnement, diminuer la durée des interventions, mettre en place des dispositifs de protection collective et individuelle, etc.

 

Prévention risques travail isolé

 

Surveillance des travailleurs

La mise en place d’une surveillance des travailleurs isolés permet de s’assurer qu’aucun incident ou accident ne survient durant la période de travail.

Cette surveillance peut être réalisée à distance par une personne désignée et à l’aide d’un moyen de communication portable (talkie-walkie ou téléphone). Un contrôle en début et en fin de poste peut être instauré ainsi qu’un contrôle périodique à intervalle réguliers.

 

Dispositif d’alarme du travailleur isolé (DATI)

Pour prévenir les risques du travail isolé et conformément aux principes généraux de prévention des risques professionnels, l’employeur doit mettre à disposition du travailleur isolé un moyen d’alerter le poste de surveillance en cas d’accident.

Le dispositif d’alarme du travailleur isolé (DATI) fonctionne soit par déclenchement manuel soit à l’aide de capteurs qui permettent de détecter une position anormale du travailleur. Cette dernière solution est particulièrement efficace si un accident empêche le travailleur de déclencher son DATI manuellement.

En effet, en cas d’accident, les capteurs du DATI peuvent être en mesure de détecter une immobilisation prolongée ou une position anormale du travailleur (allongé ou assis).

🔍 Focus : Il existe de nombreuses formes de DATI tel que des bracelets, des petits émetteurs à attacher à la ceinture, des talkies-walkies, des téléphones, etc. Quelle que soit la forme choisie, veillez à ce que le DATI soit adapté à l’isolement du travailleur et à son poste de travail.

 

Services de secours

Lorsque le travailleur isolé ou le DATI envoient un signal d’alarme au poste de surveillance, ce dernier procède à une “levée de doute” en contactant le travailleur afin de pouvoir confirmer ou infirmer l’alerte.

En cas d’alerte confirmée, le poste de surveillance doit faire le relais et appeler le service de secours immédiatement afin que le travailleur dispose le plus rapidement possible d’une aide. À cette fin, il est important que les secours soient informés de la zone d’exercice du travailleur isolé.

Certains DATI disposent également d’un signal GPS qui permet de localiser précisément le travailleur isolé. Ce signal GPS est particulièrement utile lorsque le travailleur intervient sur une zone géographique étendue.

 

Formation des travailleurs

Enfin, conformément aux principes généraux de prévention des risques, l’employeur doit mener des actions de formation et d’information à destination de ses salariés.

Ainsi, l’information et la formation des travailleurs isolés doit prendre en compte les points suivants :

  • formation à utilisation d’un dispositif d’alarme du travailleur isolé (DATI);
  • information sur les risques du travail isolé et sur les risques du poste de travail ;
  • information sur le fonctionnement du poste de surveillance;
  • information sur le fonctionnement du service des secours ;
  • définition précise du poste de travail et des tâches à accomplir afin d’éviter le dépassement de tâches ;
  • information sur les mesures de prévention des risques du travail isolé ;

 

 

Que risque l’employeur en cas de d’accident d’un travailleur isolé ?

En cas d’absence, d’insuffisance ou de défaut des mesures de prévention des risques, la responsabilité civile et pénale de l’employeur peut être engagée (Cass. crim. 5 décembre 2000, n° 00-82.108).

En effet, dans ce cas de jurisprudence, un travailleur isolé décède lors de travaux de maintenance du trafic ferroviaire. L’isolement du travailleur qui était hors de vue du chef de manœuvre et l’absence de moyen de communication sont mises en cause.

Pour rappel, le manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement engage la responsabilité pénale de l’employeur et notamment dans ces trois cas de figure :

 

À retenir :

❖   Le travail isolé rend le secours des travailleurs plus difficile ;

❖   L’évaluation des risques permet d’identifier les postes de travail isolé et les caractéristiques de l’isolement des travailleurs ;

❖   La mise en place d’une surveillance, d’un DATI et de services de secours permet de prévenir efficacement les risques liés au travail isolé.

 

Article rédigé par Clara Godin