HSE Réglementaire
Réglementation HSE

Droit d’alerte et droit de retrait en cas de danger grave et imminent : que dit la réglementation ?

Lorsque les travailleurs sont confrontés à un danger grave et imminent dans l’exercice de leur travail, ils peuvent exercer leur droit d’alerte et leur droit de retrait. Dans cet article, retrouvez dans quelles situations utiliser le droit d’alerte, comment l’exercer et les obligations de l’employeur !

 

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Qu’est-ce que le droit d’alerte en cas de danger grave et imminent ?

📌 Important :

Le droit d’alerte en cas de danger grave et imminent permet au travailleur d’alerter l’employeur dès lors qu’il constate (Article L4131-1 C.Trav.) :

•       soit un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ;

•       soit une défectuosité dans les systèmes de protection.

L’exercice de ce droit d’alerte doit être motivé par un danger particulièrement grave ou inhabituel et qui présente une menace immédiate pour le travailleur.

Exemples de situations présentant un danger grave et imminent :

  • dysfonctionnement d’un système d’aération lors de l’utilisation de produits chimiques dangereux ;
  • absence de garde-corps sur un toit ;
  • température anormalement basse dans des locaux de travail ;
  • équipement de travail mal entretenu ou endommagé ;

 

Qu’est-ce que le droit de retrait ?

Le droit de retrait permet à un travailleur d’arrêter son travail ou de quitter son poste lorsqu’il constate un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ou une défectuosité dans les systèmes de protection (Article L4131-1 C.Trav.).

⚠️ Attention : Les travailleurs qui utilisent leur droit de retrait doivent se retirer de la situation dangereuse sans créer pour les autres une nouvelle situation de danger grave et imminent (Article L4132-1 C.Trav.).

 

L’employeur n’a pas le droit de demander à un travailleur qui a exercé son droit de retrait de reprendre son travail tant que le danger en question persiste et notamment s’il s’agit d’une défectuosité d’un système de protection.

🔍 Focus : Le droit de retrait est logiquement lié à l’exercice du droit d’alerte en cas de danger grave et imminent. Néanmoins, il n’est pas obligatoire d’alerter préalablement l’employeur pour exercer son droit de retrait.

 

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Comment exercer le droit d’alerte et le droit de retrait ?

Afin d’apporter les solutions les plus adaptées, l’exercice du droit d’alerte et du droit de retrait nécessite le respect par l’employeur et le travailleur d’une procédure stricte.

 

Quelles situations justifient l’exercice du droit d’alerte et du droit de retrait ?

Dès lors qu’un travailleur constate une situation dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent, l’exercice du droit d’alerte et du droit de retrait est en principe justifié.

C’est pourquoi, aucune sanction et aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur (ou d’un groupe de travailleurs) qui s’est retiré d’une situation de travail dont il avait un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou pour celle des autres (Article L4131-3 C.Trav.).

Exemples de de situations justifiant l’exercice du droit de retrait :

  • absence d’équipements de protection contre les chutes de hauteur dans le cadre de travaux d’appartement ( soc., 9 mai 2000, no 97-44.234) ;
  • température de 2°C dans un atelier de travail (CA Paris, 22e ch. sect. C, 7 juin 1988) ;
  • dysfonctionnement d’un bouton de sécurité sur une machine de travail dont les vérifications périodiques n’ont pas été faites ( soc., 11 déc. 1985, no 83-45.566).

 

En revanche, lorsqu’un travailleur exerce son droit de retrait sans motif raisonnable, il peut être sanctionné et notamment par des retenues sur salaire pour usage abusif du droit de retrait (Cass. soc. 11 juillet 1989, n°86-43.497).

Ainsi, la légitimité du droit de retrait est déterminée par les motifs qui ont poussé le travailleur à se retirer de la situation présumée dangereuse.

La mauvaise foi d’un travailleur, l’absence totale de danger ou encore la présence d’un danger inhérent à l’activité et pour lequel des mesures de protection sont mises en place ne justifient pas l’usage du droit de retrait.

 

Exemples de situations de retrait injustifiées :

  • L’agression d’un travailleur ne justifie pas l’exercice du droit de retrait a posteriori de l’incident car aucune raison ne permet de penser que l’évènement pourrait se reproduire (CA Paris, 21e ch., 26 avril 2001) ;
  • Une épidémie dans un hôpital ou un problème technique dans une centrale nucléaire ne justifient pas l’usage du droit de retrait car ces risques sont inhérents à ces activités (TA Versailles, 2 juin 1994, n° 872364 et CA Versailles, 26 février 1996) ;
  • Des conditions météorologiques sans incidence sur la sécurité des travailleurs n’offrent pas un motif raisonnable de penser qu’une situation présente un danger grave et imminent ( soc., 20 janvier 1993, no 91-42.028).

 

Quelle est la procédure applicable au droit d’alerte et au droit de retrait ?

Étape 1 : Le travailleur exerce son droit de retrait

Un travailleur qui constate une situation qu’il juge dangereuse peut arrêter son travail en quittant son poste.

⚠️ Attention : En se retirant de la situation dangereuse, le travailleur ne doit pas créer de danger supplémentaire pour les autres travailleurs.

 

Étape 2 : Le travailleur exerce son droit d’alerte en cas de danger grave et imminent

Lorsque le travailleur s’est retiré de la situation jugée dangereuse, il doit avertir l’employeur du danger grave et imminent auquel il a été confronté.

🔍 Focus : Les travailleurs peuvent d’abord avertir un membre élu du comité social et économique (CSE) afin que ce dernier puisse alerter lui-même l’employeur du danger grave et imminent (Article L4131-2 C.Trav.).

 

Étape 3 : L’employeur met en place des mesures et instructions de sécurité

📌 Important :

Dès lors que l’employeur a connaissance du danger grave et imminent, il doit donner les instructions et prendre les mesures nécessaires pour permettre aux travailleurs d’arrêter leur activité et de se mettre en sécurité et notamment en quittant immédiatement leur lieu de travail (Article L4132-5 C.Trav.).

En fonction du danger rencontré, l’employeur doit adapter les mesures et instructions. Il peut être amené à évacuer l’ensemble de l’entreprise ou arrêter les équipements de travail si le danger le justifie.

 

Étape 4 : L’employeur inscrit l’alerte dans un registre spécifique

Lorsque l’alerte est donnée par un membre élu du CSE, l’employeur doit inscrire cette alerte dans le registre des dangers graves et imminents (Article L4132-2 C.Trav.).

L’avis est daté et signé et doit notamment mentionner (Article D4132-1 C.Trav.) :

  • les postes de travail concernés par le danger constaté ;
  • la nature et la cause du danger ;
  • le nom des travailleurs exposés.

Notez-le : Les pages du registre des dangers graves et imminents doivent être numérotées et authentifiées par le tampon du CSE.

 

Étape 5 L’employeur mène une enquête et met en place des mesures pour résoudre le danger

Dans le cas où l’alerte est donnée par un membre du CSE, l’employeur et le membre du CSE donneur d’alerte enquêtent ensemble sur le danger rencontré (Article L4132-2 C.Trav.).

L’employeur doit également prendre toutes les dispositions nécessaires pour mettre fin à la situation de danger.

 

Étape 6 : Accord entre l’employeur et le CSE pour la résolution du danger

À la suite de l’enquête, s’il existe un désaccord sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, le CSE doit être réuni d’urgence dans un délai maximal de 24h (Article L4132-3 C.Trav.).

🔍 Focus : L’agent de contrôle de l’inspection du travail et l’agent du service de prévention de la caisse régionale d’assurance maladie doivent être immédiatement informés par l’employeur et peuvent assister à cette réunion exceptionnelle.

Enfin, en cas de désaccord entre l’employeur et la majorité du CSE sur les mesures à prendre, l’inspection du travail doit être saisie immédiatement par l’employeur (Article L4132-4 C.Trav.).

 

Quels sont les risques pour l’employeur en cas de danger grave et imminent ?

📌 Important :

Lorsqu’un travailleur est victime d’un accident du travail causé par un danger grave et imminent qui avait été signalé à l’employeur, la faute inexcusable de ce dernier est reconnue de droit (Article L4131-4 C.Trav.).

En pratique, cela signifie que l’employeur devra automatiquement verser des indemnités complémentaires à la victime d’un tel accident.

Par ailleurs, lorsque l’inspection du travail constate un danger grave et imminent pour l’intégrité physique des travailleurs, elle est autorisée à dresser immédiatement un procès-verbal sans mise en demeure préalable (Article L4721-5 C.Trav.).

🔍 Focus : L’inspection du travail peut, dans certains cas précis (défaut de protection contre les chutes de hauteur, absence de dispositifs contre les risques d’ensevelissement, etc.), ordonner l’arrêt temporaire des travaux ou de l’activité concernés (Article L. 4731-1 C.Trav.).

 

À retenir :

❖     L’exercice du droit d’alerte et du droit de retrait doit être justifié par la présence d’un danger grave et imminent ;

❖     Les travailleurs qui utilisent leur droit d’alerte et leur droit de retrait doivent avoir un motif raisonnable de penser que la situation est dangereuse ;

❖     En présence d’un danger grave et imminent, l’employeur doit donner immédiatement des instructions pour mettre ses salariés en sécurité ;

❖     L’inspection du travail peut dresser un procès-verbal sans mise en demeure préalable lorsqu’elle constate un danger grave et imminent.

 

Article rédigé par Clara Godin