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Compte professionnel de prévention (C2P) : on fait le point !

Le cadre réglementaire applicable au compte professionnel de prévention (C2P) a récemment subi des modifications dans le cadre de la réforme des retraites. L’occasion pour nous de faire le point sur la réglementation en vigueur !

C2P
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Qu’est-ce que le compte professionnel de prévention (C2P) ?

Le compte professionnel de prévention (C2P) est un système de compensation destiné au travailleur exposé à des facteurs de risques professionnels particuliers.

Le C2P prend la forme d’un compte dématérialisé sur lequel les travailleurs peuvent accumuler des points. L’employeur doit déclarer à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) l’exposition de ses salariés aux facteurs de risques professionnels. Celle-ci pourra alors attribuer des points aux salariés en fonction de leur degré d’exposition.

L’utilisation des points de leur C2P permet aux travailleurs de bénéficier de certains avantages et notamment d’un départ à la retraite anticipé.

Notez-le : Depuis le 1er octobre 2017, le C2P a remplacé le compte personnel de prévention de la pénibilité créé en 2015. Le terme de “pénibilité” a été supprimé en 2017 même s’il reste parfois d’usage. On parle désormais plutôt “d’usure professionnelle”.

 

Quels sont les métiers et postes concernés par le compte professionnel de prévention ?

Les avantages offerts par le compte professionnel de prévention s’appliquent à certains facteurs de risques spécifiques (Article L4161-1 C.Trav.) liés :

  • à des contraintes physiques marquées

Les contraintes physiques sont présentes dans de nombreux domaines d’activité mais certains métiers tels que les métiers du bâtiment et des travaux publics (BTP), les agriculteurs ou encore les ouvriers manutentionnaires y sont davantage exposés.

  • à un environnement physique agressif

Il s’agit généralement de métiers exposés à des températures extrêmes ou un environnement sous pression tels que les scaphandriers, plongeurs, scientifiques, pompiers, fondeurs, soudeurs, certains métiers du BTP, etc.

  • à des rythmes de travail particuliers

Les postes effectués sur des rythmes de travail particuliers tels que le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes ou un travail comportant des gestes répétitifs des membres supérieurs sont considérés comme des postes comportant des facteurs de risques professionnels.

Par conséquent, les métiers comportant des facteurs de risques relevant de ces trois catégories peuvent potentiellement donner le droit aux salariés exposés de cumuler des points sur leur compte professionnel de prévention.

Néanmoins, l’obtention d’un compte professionnel de prévention dépend également du degré d’exposition des salariés. Ainsi, seuls les salariés exposés à des facteurs de risques professionnels au-dessus des seuils fixés peuvent prétendre à l’obtention de points sur leurs comptes professionnels de prévention (Article L4163-1 C.Trav.).

Facteurs de risques professionnels

 

Quelles sont les obligations réglementaires concernant le compte professionnel de prévention (C2P) ?

Déclaration de l’exposition des salariés

L’employeur doit déclarer chaque année les salariés exposés à des facteurs de risques professionnels au-dessus des seuils autorisés.

Voici un tableau répertoriant les facteurs de risques professionnels donnant droit au C2P avec les seuils d’exposition (Article D4163-2 C.Trav.) :

Facteurs de risques professionnels Seuil d’exposition
Action ou situation Intensité minimale Durée minimale
a) Activités exercées en milieu hyperbare Interventions ou travaux 1200 hectopascals 60 interventions ou travaux par an
b) Températures extrêmes Température inférieure ou égale à 5 degrés Celsius ou au moins égale à 30 degrés Celsius 900 heures par an
c) Bruit Sur une période de référence de huit heures d’au moins 81 décibels (A) 600 heures par an
Exposition à un niveau de pression acoustique de crête au moins égal à 135 décibels (C) 120 fois par an

 

FACTEUR DE RISQUES PROFESSIONNELS SEUIL
Action ou situation Intensité minimale Durée minimale
a) Travail de nuit dans les conditions fixées aux articles L. 3122-2 à L. 3122-5 Une heure de travail entre 24 heures et 5 heures 100 nuits par an
b) Travail en équipes successives alternantes Travail en équipes successives alternantes impliquant au minimum une heure de travail entre 24 heures et 5 heures 30 nuits par an
c) Travail répétitif impliquant l’exécution de mouvements répétés des membres supérieurs Cycle inférieur ou égal à 30 secondes : 15 actions techniques ou plus 900 heures par an
Cycle supérieur à 30 secondes : 30 actions techniques ou plus par minute

Source : Code du Travail, Article D4163-2.

 

 🔎 Focus : Les expositions aux facteurs de risques professionnels sont évaluées après prise en compte des mesures de protection collective et individuelle mises en œuvre par l’employeur (Article D4163-5 C.Trav.).

La déclaration se fait auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) et concerne les six facteurs de risques suivants (Article L4163-1 C.Trav.) :

  • les activités exercées en milieu hyperbare ;
  • les températures extrêmes ;
  • l’exposition au bruit ;
  • le travail de nuit ;
  • le travail en équipes successives alternantes ;
  • le travail répétitif.

Depuis le 1er octobre 2017, seuls ces six facteurs de risques demeurent au sein du C2P et doivent faire l’objet d’une déclaration de la part de l’employeur. Sont donc “sortis” du C2P les quatre autres facteurs de risques suivants qui figuraient auparavant dans le compte professionnel de prévention de la pénibilité :

  • les manutentions manuelles de charges ;
  • les postures pénibles ;
  • les vibrations mécaniques ;
  • l’exposition aux agents chimiques dangereux.

Néanmoins, des aménagements sont prévus pour ces quatre facteurs de risques, notamment la possibilité d’un départ à la retraite anticipé sous certaines conditions.

⚠️ Attention : La déclaration de l’employeur doit être effectuée au terme de chaque année civile et au plus tard au moment de la paie du mois de décembre, ou lors de la paie de fin de contrat pour les contrats qui s’achèvent au cours de l’année civile (Article R4163-8 C.Trav.).

Pour garantir son exactitude, la déclaration doit être réalisée au regard des conditions habituelles de travail du poste concerné appréciées sur une moyenne annuelle.

⚠️ Attention : Le salarié en désaccord avec son employeur sur son degré d’exposition aux facteurs de risques professionnels peut effectuer une réclamation auprès de la CPAM seulement s’il a porté cette contestation devant l’employeur au préalable (Article L4163-18 C.Trav.).

 

Accord d’entreprise pour la prévention des facteurs de risques professionnels

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, un accord en faveur de la prévention des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels doit être négocié lorsqu’au moins 25 % de l’effectif se trouve exposé aux facteurs risques professionnels ou lorsque l’indice de sinistralité est supérieur à 0,25 (Article L4162-1 C.Trav.).

🔎 Focus : Ces accords sont d’une importance cruciale pour certains domaines fortement exposés aux facteurs de risques professionnels, tels que le BTP, l’aéronautique, la métallurgie, l’industrie minière, etc.

L’accord est conclu pour une durée maximale de trois ans (Article L4162-3 C.Trav.) et doit traiter d’au moins deux des thèmes suivants (Article D4162-3 C.Trav.) :

  • la réduction des poly-expositions aux facteurs de risques professionnels ;
  • l’adaptation et l’aménagement du poste de travail ;
  • la réduction des expositions aux facteurs de risques professionnels.

Il doit également traiter d’au moins deux des thèmes suivants :

  • l’amélioration des conditions de travail ;
  • le développement des compétences et des qualifications ;
  • l’aménagement des fins de carrière ;
  • le maintien en activité des salariés exposés aux facteurs de risques.

⚠️ Attention : pour les entreprises concernées, l’absence d’un tel d’accord peut entraîner une pénalité financière pour l’employeur (Article L4162-4 C.Trav.). Cette pénalité est fixée par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DREETS) et ne peut pas excéder 1% des rémunérations versées aux travailleurs exposés aux facteurs de risques (Article R4162-6 C.Trav.).

 

Quelles sont les principales évolutions réglementaires concernant le compte professionnel de prévention ?

Dans le cadre de la réforme du système de retraite menée par la Gouvernement, le compte professionnel de prévention (C2P) a subi plusieurs évolutions.

Parmi ces évolutions, on peut citer notamment l’introduction de la possibilité pour les salariés d’utiliser leurs points inscrits sur leur compte pour le financement d’une reconversion professionnelle. Cette action se couple avec le financement de formations professionnelles et a pour objectif de permettre l’accès à des emplois moins exposés aux facteurs de risques.

Par ailleurs, deux décrets parus le 11 août 2023 et applicables depuis le 1er septembre 2023 (décret n° 2023-759 du 10 août 2023 et décret 2023-760 du 10 août 2023) ont acté la création d’un fond d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle (FIPU), dédié au financement d’actions de prévention des expositions aux facteurs de risques ergonomiques (vibrations mécaniques, port de charges lourdes et postures pénibles).

Notez-le : la répartition des crédits du FIPU ainsi que les orientations générales seront définies par la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Elle sera également chargée d’effectuer la “cartographie” des métiers concernés afin de mieux cibler les domaines concernés.

Concernant les évolutions restantes, il s’agit principalement d’ajustements de la réglementation en vigueur :

  • suppression du plafond du nombre de points inscrits sur le C2P ;
  • diminution du seuil d’exposition du facteur de risques lié au travail de nuit, passé de 120 à 100 nuits par an ;
  • diminution du seuil d’exposition du facteur de risque lié au travail en équipes successives alternantes, passé de 50 à 30 nuits par an ;
  • renforcement de l’acquisition de droits dus à la poly-exposition aux facteurs de risques ;
  • mise en place d’un barème de conversion plus favorable pour les utilisations des points du C2P pour la formation et le temps partiel.

Pour plus de détails, n’hésitez pas à consulter la page dédiée sur le site internet du Ministère du travail.

À retenir :

❖  Le compte professionnel de prévention offre des avantages aux salariés exposés à certains facteurs de risques professionnels au-dessus des seuils d’exposition réglementaires ;

❖  L’employeur doit déclarer chaque année ses salariés exposés aux facteurs de risques au-dessus des seuils réglementaires ;

❖  Un accord d’entreprise en faveur de la prévention des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels doit être établi dans les entreprises d’au moins 50 salariés ;

❖  Le cadre réglementaire du C2P a récemment évolué dans le cadre de la réforme des retraites.

Procédure du compte professionnel de prévention

Quelles sont les modalités de fonctionnement du compte professionnel de prévention (C2P) ?

Les avantages offerts par le compte professionnel de prévention se déclinent en quatre utilisations (Article L4163-7 C.Trav.) :

  1. le financement d’actions de formation professionnelle continue ;
  2. le financement du complément de rémunération pour un passage à temps partiel ;
  3. le financement d’un départ en retraite anticipé (avant l’âge légal) ;
  4. le financement d’un projet de reconversion professionnelle et notamment de la rémunération pendant le projet de reconversion professionnelle.

Concernant l’acquisition de points sur le compte professionnel de prévention (C2P), l’exposition à chaque facteur de risques au-dessus des seuils réglementaires permet au salarié de cumuler quatre points par an (Article R4163-9 C.Trav.).

Pour les travailleurs qui ne sont pas susceptibles d’acquérir des droits au titre du compte professionnel de prévention, une fiche de suivi individuelle, mentionnant les facteurs de risques auxquels ils sont exposés, doit être établie par l’employeur afin d’assurer le bon suivi médical des salariés (Article D4163-4 C.Trav.).

🔎 Focus : les salariés affiliés à un régime spécial de retraite comportant un dispositif spécifique de reconnaissance et de compensation des effets de l’exposition à certains risques professionnels ne peuvent pas acquérir de points au titre du compte professionnel de prévention (Article L4163-4 C.Trav.).

Par ailleurs, l’utilisation des points du C2P est réglementée de façon à donner des avantages équitables aux salariés (Article R4163-11 C.Trav.) :

  • pour le financement de la formation ou du projet de reconversion professionnelle, un point équivaut à 500 euros (contre 375 euros auparavant) ;
  • pour la réduction du temps de travail à mi-temps, 10 points financent le complément de salaire pendant quatre mois (contre trois mois auparavant) ;
  • pour le financement d’un départ de retraite anticipé, 10 points ouvrent droit à un trimestre de majoration de durée d’assurance.

En outre, les 20 premiers points acquis sont réservés au financement de la formation professionnelle ou au projet de reconversion professionnelle (Article R4163-13 C.Trav.).

🔎 Focus : La demande d’utilisation des points du C2P pour un départ à la retraite anticipé ne peut être effectuée qu’à partir de l’âge de 55 ans (Article R4163-30 C.Trav.).

 

Conclusion

Le compte professionnel de prévention (C2P) vise à donner des avantages aux salariés exposés aux facteurs de risques professionnels au-dessus des seuils réglementaires. Il s’agit d’un outil crucial pour la prévention de l’exposition aux facteurs de risques professionnel et donc pour assurer la santé physique et mentale des salariés de l’entreprise.

 

Article rédigé par Clara GODIN