Afin d’améliorer la performance des bâtiments et de réduire la facture énergétique, la réglementation française ne cesse de se durcir. Prenons pour exemple la création de la réglementation thermique en 1974 (et sa mise à jour de nombreuses fois depuis cette date), qui impose des règles de plus en plus strictes sur les performances énergétiques des bâtiments neufs. Plus récemment, la loi ELAN, parue en 2018, impose une réduction de la consommation énergétique du parc tertiaire français. Dans ce cadre, le décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 (ou décret tertiaire) précise les modalités d’application de cette loi.
Il confirme ainsi les objectifs ambitieux définis dans la loi ELAN pour les années 2030, 2040 et 2050 :
- soit réduire la consommation d’énergie finale, respectivement de 40 %, 50 % et 60 % par rapport à une consommation énergétique de référence ;
- soit atteindre un niveau de consommation d’énergie finale fixé, en valeur absolue, en fonction de la consommation énergétique des bâtiments nouveaux de leur catégorie.
Suis-je concerné par les objectifs définis dans le décret tertiaire ?
Peuvent être concernés par ce décret tertiaire tout bâtiment, parties de bâtiments ou ensemble de bâtiments hébergeant des activités tertiaires (activité économique (marchande ou non marchande) qui ne relève pas du secteur primaire ou du secteur secondaire).
Précisément, sont concernés les bâtiments, parties de bâtiments ou ensemble de bâtiments hébergeant des activités tertiaires du secteur public et du secteur privé, qui sont en service depuis le 24 novembre 2018, dans les configurations suivantes :
- bâtiment d’une surface de plancher supérieur ou égale à 1 000 m² exclusivement alloué à un usage tertiaire ;
- toutes parties d’un bâtiment à usage mixte qui hébergent des activités tertiaires et dont le cumul des surfaces de plancher est supérieur ou égal à 1000 m² ;
- tout ensemble de bâtiments situés sur une même unité foncière ou sur un même site (plusieurs bâtiments à usage tertiaire sur une même unité foncière partageant pour un type d’énergie le même point de livraison) dès lors que ces bâtiments hébergent des activités tertiaires sur une surface de plancher cumulée supérieure ou égale à 1 000 m².
La FAQ « Eco Energie Tertiaire » de la plateforme OPERAT précise que les bâtiments, parties de bâtiments ou ensemble de bâtiments à usage tertiaire d’un site industriel, sont concernés par cette obligation et notamment ses locaux de bureaux, de restauration, de logistique, …
Quelques notions importantes à retenir
Les exploitants de tels bâtiments, parties de bâtiments ou ensemble de bâtiments tertiaires doivent dès maintenant se positionner sur leur assujettissement à ce décret tertiaire en prêtant attention aux points suivants :
- les obligations d’actions de réduction des consommations d’énergies concernent autant les propriétaires que les locataires des bâtiments assujettis ;
- lorsque des activités tertiaires initialement hébergées dans un bâtiment, une partie de bâtiment ou un ensemble de bâtiments soumis à l’obligation cessent, les propriétaires et les locataires qui continuent à y exercer des activités tertiaires restent soumis aux obligations même si la surface cumulée des activités tertiaires hébergées devient inférieure à 1000 m². De la même manière, un bâtiment, des parties de bâtiment ou un ensemble de bâtiments non assujettis initialement, peuvent le devenir au cours du temps ;
- dans le cas d’un changement d’activités d’un bâtiment, partie de bâtiment ou ensemble de bâtiments soumis à cette obligation :
- s’il s’agit d’une nouvelle activité tertiaire, cette nouvelle activité demeure assujettie au dispositif et les nouveaux objectifs sont déterminés suivant les dispositions prévues dans le code de l’environnement ;
- dans le cas où une activité tertiaire cesse, et qu’il y a un changement de destination, le ou les locaux concernés ne sont plus assujettis aux obligations. Cependant, la consommation énergétique de référence est conservée sur la plateforme numérique OPERAT jusqu’à la reprise éventuelle d’une activité tertiaire.
Je suis concerné par le décret tertiaire, que dois-je faire à présent ?
Chaque année, à partir de septembre 2021, les personnes concernées devront remonter leurs informations de consommation dans la plateforme OPERAT gérée par l’ADEME et notamment :
- la ou les activités tertiaires qui y sont exercées ;
- la surface des bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments soumis à l’obligation ;
- les consommations annuelles d’énergie par type d’énergie, des bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments ;
- l’année de référence et les consommations de référence associées (en raison du contexte sanitaire de l’année 2020, les personnes concernées peuvent déclarer leur consommation énergétique de référence jusqu’au 30 septembre 2022), par type d’énergie. A défaut de renseignement portant sur l’année de référence, celle-ci correspondra à la première année pleine d’exploitation dont les consommations énergétiques sont remontées sur la plateforme de recueil et de suivi ;
- le renseignement des indicateurs d’intensité d’usage relatifs aux activités hébergées, …
Sur la base de ces données, OPERAT délivre une attestation numérique annuelle. Cette dernière est complétée par un système de notation « Eco Energie Tertiaire » qui qualifie l’avancée dans la démarche de réduction des consommations d’énergie définie dans le décret tertiaire, au regard des résultats obtenus par rapport aux objectifs attendus. Voici ce système de notation qui comporte 5 niveaux (feuille grise à 3 feuilles vertes) :
source : Legifrance
Pour juger de la conformité face aux objectifs du décret tertiaire, OPERAT procède automatiquement, après le recueil des données de chaque décennie, à la comparaison de la consommation d’énergie finale avec les deux objectifs. Si un des deux objectifs est atteint, il est considéré que, pour la décennie concernée, les objectifs sont atteints.
Des arrêtés complémentaires permettent de préciser les modalités de calcul et d’ajustement de la consommation d’énergie finale, les conditions de modulations des objectifs de réduction de la consommation d’énergie finale ainsi que le contenu du dossier technique nécessaire en cas de modulation des objectifs (dont la réalisation d’audits énergétiques).
Puis-je mutualiser les résultats obtenus à l’échelle de tout ou partie d’un patrimoine ?
Aucun objectif n’est défini à l’échelle d’un patrimoine. Cependant, il est possible d’apprécier la consommation d’énergie totale sur l’ensemble d’un patrimoine et de permettre de compenser les « moins bons » résultats de certaines entités qui n’ont pas atteint l’un des objectifs qui leur étaient assignés par les bons résultats obtenus par d’autres entités qui ont atteint l’un des objectifs.
Si un des deux objectifs est atteint pour une entité d’un patrimoine, l’écart de consommation d’énergie le plus significatif peut être réaffecté à une ou plusieurs entités de ce patrimoine ne respectant aucun de ces objectifs.
La plateforme OPERAT présente un module « Evaluation de l’atteinte de l’objectif à l’échelle d’un patrimoine » qui permet aux personnes concernées de procéder à des requêtes d’évaluation de leur situation à l’échelle de tout ou partie de leur patrimoine.