HSE Réglementaire
Réglementation HSE

Zoom sur le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement

Tout travailleur dispose du droit d’alerter l’employeur s’il constate un risque grave d’atteinte à l’environnement ou à la santé publique. Quelle est la procédure ? Quelles sont les obligations de l’employeur ? On vous présente tout cela en détail dans cet article !

 

droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement
212151214 @DedMityay

 

Qu’est-ce que le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement ?

Mis en place par la loi n°2013-316 du 16 avril 2013 et le décret n°2014-324 du 11 mars 2014, le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement permet à tout travailleur constatant un risque grave d’atteinte à l’environnement ou à la santé publique de le signaler à son employeur dans le but d’éviter la survenance du dommage.

Plus précisément, la réglementation dispose que le travailleur doit alerter immédiatement l’employeur s’il estime, de bonne foi, que les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’entreprise font peser un risque grave sur la santé publique ou l’environnement (articles L4133-1 et L4133-2 C. trav.).

Notez-le : Le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement doit être distingué du dispositif des lanceurs d’alerte de portée générale. En effet, son périmètre est strictement cantonné aux problématiques relevant du champ de la santé publique et de l’environnement.

 Il doit aussi être distingué du droit d’alerte en cas de danger grave et imminent en santé-sécurité au travail (article L2312-60 C. trav.) qui s’accompagne d’un droit de retrait du salarié.

 

Qui peut exercer le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement ?

Le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement est ouvert à tout travailleur, qu’il soit ou non membre du comité social et économique (CSE). Il s’applique dans toutes les entreprises, peu importe l’effectif.

Il est important de préciser que la notion de “travailleur” est plus large que celle de salarié. Elle inclut notamment les stagiaires, les intérimaires et plus généralement, toute personne placée à quelque titre que ce soit sous l’autorité de l’employeur.

 

Protection du lanceur d’alerte

Le travailleur qui lance une alerte en matière sanitaire et environnementale bénéficie d’une protection globale (article L4133-3 C. trav.) :

  • il ne peut être sanctionné, licencié ni faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir signalé ou divulgué des informations dans le cadre de son droit d’alerte (article L1121-2 du Code du travail) ;
  • il ne peut être tenu responsable (civilement et pénalement) des dommages causés du fait de son signalement dès lors qu’il avait des motifs raisonnables de croire que ce signalement était nécessaire (article 10-1 de la loi n°2016-1691) ;
  • En cas de rupture du contrat de travail consécutive au signalement d’une alerte, il peut saisir le conseil des prud’hommes (articles 12 à 13-1 de la loi n°2016-1691).

 

Quelles sont les conditions d’exercice du droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement ?

L’exercice du droit d’alerte est soumis à trois conditions cumulatives :

  • le risque doit avoir un impact sur la santé publique et/ou l’environnement ;
  • le risque doit être grave (mais non obligatoirement “imminent” comme pour le droit d’alerte en cas de danger grave et imminent) ;
  • le risque grave doit présenter un lien avec les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’entreprise.

 Exemples de situations pouvant donner lieu à l’exercice du droit d’alerte

 En matière de santé publique : infections, contamination de denrées alimentaires, etc.

En matière d’environnement : pollution de l’air, des sols ou de l’eau, bruits excessifs par rapport aux seuils réglementaires, élimination de déchets non-conforme, etc.

 

Concrètement, quelles obligations pèsent sur l’employeur ?

Consignation de l’alerte

Les articles D4133-1 et D4133-2 du Code du travail fixent la procédure applicable respectivement en cas d’alerte émanant d’un travailleur ou d’un membre du CSE.

Dans les deux cas, l’alerte doit être obligatoirement consignée sur un registre spécial (le registre des alertes sanitaires et environnementales) dont les pages sont numérotées. Elle doit être datée et signée.

🔎 Focus : Ces formalités visent, d’une part, à faire courir le délai pendant lequel l’alerte doit être traitée par l’employeur (et la saisine possible du préfet), d’autre part, à responsabiliser le lanceur d’alerte en évitant les signalements anonymes ou malveillants.

Par ailleurs, l’alerte consignée doit obligatoirement mentionner :

  • les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement dont le travailleur estime qu’ils présentent un risque grave pour la santé publique ou l’environnement ;
  • le cas échéant, les conséquences potentielles pour la santé publique ou l’environnement ;
  • toute autre information utile.

Ce registre doit être tenu à la disposition du CSE (article D4133-3 C. trav.).

⚠️ Attention : Le fait de ne pas mettre le registre à la disposition du CSE expose l’employeur à une amende d’un montant maximal de 10 000 euros. Cette amende est portée à 30 000 euros et un an d’emprisonnement en cas de récidive. Elle est appliquée autant de fois qu’il y a de travailleurs concernés (article L4741-1 C. trav.).

Notons que dans les entreprises disposant de plusieurs établissements mais ne comportant qu’un seul CSE, la mise en place du registre d’alerte au niveau du siège est suffisante. L’employeur n’est pas tenu de mettre en place un registre dans chacun des établissements (Cass. soc., 28 septembre 2022, n°21-16993). Au contraire, il semble que lorsque chaque établissement d’une même entreprise est considéré comme une entité légale indépendante et dotée d’un CSE, la société doit alors mettre en place le registre dans chacun de ses établissements distincts.

 

Traitement de l’alerte

Lorsque l’alerte émane d’un travailleur, l’employeur doit informer ce dernier de la suite qu’il réserve à l’alerte (article L4133-1 C. trav.).

Lorsque l’alerte émane d’un membre du CSE, l’employeur doit examiner la situation conjointement avec celui-ci et l’informer de la suite qu’il réserve à l’alerte (article L4133-2 C. trav.).

Dans tous les cas, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à la situation ayant donné lieu à l’exercice du droit d’alerte.

 Notez-le : Le CSE doit être associé tout au long de la procédure du droit d’alerte. Ainsi, l’employeur doit l’informer des alertes qui lui sont transmises et des suites données (article L4133-4 C. trav.). Il doit également informer le CSE des alertes ayant donné lieu à la saisie du préfet.

 

Information des travailleurs

En amont d’une éventuelle procédure l’alerte, l’employeur doit informer les salariés sur :

 les risques que les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement peuvent faire peser sur la santé publique ou l’environnement ;

  • les mesures prises pour y remédier.

 Cette obligation s’ajoute à l’obligation générale d’information sur les risques en matière de santé-sécurité au travail prévue à l’article L4141-1 du Code du travail.

 

Réunion du CSE dans les entreprises d’au moins 50 salariés

Enfin, le Code du travail dispose que le CSE doit obligatoirement être réuni dès lors que survient un événement grave lié à l’activité de l’établissement portant atteinte à la santé publique ou à l’environnement. 

À retenir :

❖  Le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement s’applique à toutes les entreprises peu importe l’effectif

❖  Il peut être exercé par tout travailleur ou membre du CSE constatant un risque grave pour la santé publique ou l’environnement résultant des produits ou procédés de fabrication mis en œuvre dans l’entreprise

❖  L’employeur doit obligatoirement consigner l’alerte dans le registre des alertes sanitaires et environnementales

Article rédigé par Clara Godin