HSE Réglementaire
Management HSE

1er juillet 2016 : point à date sur les facteurs de pénibilité

Depuis ce 1er juillet 2016, 6 nouveaux facteurs de pénibilité sont entrés en vigueur.

De plus, une nouvelle instruction est parue afin d’apporter des précisions sur l’applicabilité du dispositif (rappel des dispositions applicables pour les expositions de l’année 2015, présentation des mesures transitoires pour l’année 2016, …). Nous vous proposons un point d’étape à ce sujet.

 

Les 6 nouveaux facteurs de pénibilité

Tout d’abord, il faut bien noter les 6 nouveaux facteurs de pénibilité qui sont rentrés en vigueur au 1er juillet 2016 :

Facteurs de pénibilité aux risques professionnels Seuils
Action ou situation Intensité minimale Durée minimale
Manutentions manuelles de charges définies à l’article R. 4541-2 Lever ou porter Charge unitaire de 15 kilogrammes 600 heures par an
Pousser ou tirer Charge unitaire de 250 kilogrammes 600 heures par an
Déplacement du travailleur avec la charge ou prise de la charge au sol ou à une hauteur située au-dessus des épaules Charge unitaire de 10 kilogrammes 600 heures par an
Cumul de manutentions de charges 7,5 tonnes cumulées par jour 120 jours par an
Postures pénibles définies comme positions forcées des articulations Maintien des bras en l’air à une hauteur située au dessus des épaules ou positions accroupies ou à genoux ou positions du torse en torsion à 30 degrés ou positions du torse fléchi à 45 degrés 900 heures par an
Vibrations mécaniques mentionnées à l’article R. 4441-1 Vibrations transmises aux mains et aux bras Valeur d’exposition rapportée à une période de référence de 8 heures de 2,5 m/ s2 450 heures par an
Vibrations transmises à l’ensemble du corps Valeur d’exposition rapportée à une période de référence de 8 heures de 0,5 m/ s2 450 heures par an
Facteurs de risques professionnels Seuils
Action ou situation Intensité minimale Durée minimale
Agents chimiques dangereux (ACD) mentionnés aux articles R. 4412-3 et R. 4412-60, y compris les poussières et les fumées Exposition à un agent chimique dangereux relevant d’une ou plusieurs classes ou catégories de danger(*) définies à l’annexe I du règlement (CE) n° 1272/2008 et figurant dans un arrêté du ministre chargé du travail Le seuil est déterminé, pour chacun des agents chimiques dangereux, par application d’une grille d’évaluation prenant en compte le type de pénétration, la classe d’émission ou de contact de l’agent chimique concerné, le procédé d’utilisation ou de fabrication, les mesures de protection collective ou individuelle mises en œuvre et la durée d’exposition, qui est définie par arrêté du ministre chargé du travail et du ministre chargé de la santé
Températures extrêmes Température inférieure ou égale à 5 degrés Celsius ou au moins égale à 30 degrés Celsius 900 heures par an
Bruit mentionné à l’article R. 4431-1 Niveau d’exposition au bruit rapporté à une période de référence de huit heures d’au moins 80 décibels (A) 600 heures par an
Exposition à un niveau de pression acoustique de crête au moins égal à 135 décibels (C) 120 fois par an

 

(*) La liste des classes et catégories de dangers définies par l’arrêté du 30 décembre 2015 est :

  • sensibilisants respiratoires catégorie 1, sous catégorie 1A ou 1B : H334 ;
  • sensibilisants cutanés catégorie 1, sous catégorie 1A ou 1B : H317 ;
  • cancérogénicité, catégorie 1A, 1B ou 2 : H350, H350i, H351 ;
  • mutagénicité sur les cellules germinales, catégorie 1A, 1B ou 2 : H340, H341 ;
  • toxicité pour la reproduction, catégorie 1A, 1B ou 2, ou catégorie supplémentaire des effets sur ou via l’allaitement : H360, H360D, H360FD, H360Fd, H360Df, H361, H361d, H361fd, H362 ;
  • toxicité spécifique pour certains organes cibles à la suite d’une exposition unique, catégorie 1 ou 2 : H370, H371 ;
  • toxicité spécifique pour certains organes cibles à la suite d’une exposition répétée, catégorie 1 ou 2 : H372, H373.

En ce mois de juillet 2016, il vous faut donc, si ce n’est pas déjà fait ou en cours, identifier les personnes exposées aux facteurs nouvellement entrés en vigueur.

 

 

Précisions relatives au dispositif pénibilité

Ensuite, nous vous invitons à vous attarder sur l’instruction du 20 juin 2016 qui vient préciser les conditions de mise en œuvre de l’ensemble des obligations des employeurs : rappel des dispositions applicables pour les expositions de l’année 2015, présentation des mesures transitoires pour l’année 2016 et précision des dispositions applicables à long terme.

La nouvelle instruction donne notamment les indications suivantes :

  • Pour un travailleur affecté à plusieurs postes au cours de l’année, c’est bien l’ensemble des expositions subies par le travailleur sur l’ensemble de ces postes que l’employeur prend en compte pour déterminer son exposition moyenne annuelle
  • L’appréciation des conditions de pénibilité par l’employeur tient compte des performances attendues en termes de réduction du risque du fait des mesures de protection collective et individuelle, notamment telles qu’identifiées par le fabricant. Toutefois, il est précisé qu’il est souhaitable de pondérer cette performance au regard notamment des conditions réelles d’utilisation (exemple des protections auditives)
  • Pour les travailleurs à temps partiel, il n’y a pas de modalité particulière d’appréciation du dépassement du seuil
  • La déclaration des facteurs d’exposition et le versement des cotisations spécifiques à la pénibilité dues au titre de l’exposition de l’année 2015 peuvent être modifiés au plus tard le 30 septembre 2016. Pour le régime agricole, cette correction peut être effectuée jusqu’au 10 octobre 2016. L’instruction indique que ces mêmes dérogations seront applicables pour les expositions relatives à l’année 2016
  • Cette instruction doit être complétée par une instruction précisant les modalités d’acquisition et d’utilisation des points par les salariés

 

Dans le détail, l’instruction se compose de 8 fiches techniques que nous pouvons résumer ainsi :

 

– Fiche n°1 – Champ d’application du compte pénibilité, ouverture du compte, déclarations par l’employeur et règlement des cotisations :

Cette fiche rappelle les dispositions applicables à la déclaration des expositions et au paiement des cotisations.

 

– Fiche n°2 – Modalités de suivi des expositions pour les travailleurs n’entrant pas dans le champ d’application du compte personnel de prévention de la pénibilité

Cette fiche reprécise les catégories de travailleurs non éligibles au CPPP, pour lesquels  les employeurs doivent rédiger une fiche individuelle de suivi, lorsqu’ils sont exposés à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels au-delà des seuils. C’est notamment le cas des travailleurs détachés en France et des travailleurs affiliés à un  régime  spécial de retraite comportant un  dispositif spécifique de reconnaissance et de compensation de la pénibilité.

 

– Fiche n°3 – Seuils d’exposition aux facteurs de pénibilité applicables en 2015 et 2016 :

Plusieurs précisions sont apportées sur les définitions et les seuils d’exposition de certains facteurs :

1) Travail de nuit : l’instruction précise le cas particulier de l’astreinte ; ainsi si le travailleur demeure à son domicile en attendant d’être sollicité pour une intervention, seul le temps d’intervention effectif est pris en compte pour l’évaluation des expositions

2) Travail répétitif : pour rappel il est caractérisé par la réalisation de travaux impliquant l’exécution de mouvements répétés, sollicitant tout ou partie du membre supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte. L’instruction apporte des précisions sur la notion de cadence contrainte : celle-ci correspond à « une cadence ne permettant pas au salarié de réguler son activité et de disposer d’une récupération suffisante de la fatigue par les segments de membres sollicités ». Elle s’entend donc comme « une situation où le salarié ne peut se soustraire de la situation de travail sans préjudice immédiat pour la production, le service ou lui-même et ses collègues ».

L’instruction précise ensuite que les heures effectuées dans le cadre des deux situations définies à l’article D. 4161-2 du Code du travail (Temps de cycle > ou ≤ 30 secondes) peuvent être cumulées dans leur comptabilisation pour atteindre le seuil des 900 heures par an dès lors qu’elles sollicitent les mêmes segments du corps. Enfin, il est indiqué que pour 2015, les employeurs ayant réalisé l’évaluation et/ou la déclaration des expositions de leurs travailleurs sur la base de la première définition, préalablement à la publication des derniers décrets, ne sont pas tenus de modifier cette évaluation et/ou cette déclaration sur la base de la nouvelle définition

3) Manutention manuelle de charge : l’instruction explique que si un travailleur effectue l’une ou l’autre des actions détaillées à l’article D. 4161-2 du Code du travail (Lever/porter, Pousser/tirer, Déplacement avec la charge, Charge prise au sol ou à une hauteur supérieure aux épaules), il faut cumuler le temps pour chacune des actions et le comparer à la durée minimale annuelle de 600 h/an

4) Posture pénibles : selon l’instruction, l’évaluation consiste à évaluer les cinq postures définies dans le code du travail et à cumuler le temps passé au global

5) Vibrations mécaniques : pour ce facteur, le cumul du temps des deux situations (vibrations aux mains et aux bras et vibrations transmises à l’ensemble du corps) est également à faire lors de l’évaluation pour le comparer au seuil de 450 h/an. L’instruction recommande également à l’employeur d’exploiter la notice des machines neuves, dans laquelle le fabricant doit indiquer si l’équipement dépasse ou non les deux seuils.

6) Agents chimiques dangereux : les poussières et les fumées sont comprises dans le périmètre du facteur de risque. Quelques indications sont fournies pour expliciter le cas ou l’évaluation des risques réalisée par l’employeur révèle un risque non faible mais que les mesures mises en place permettent de supprimer ou réduire le risque au minimum : ventilation à la source, contrôles techniques…

7) Températures extrêmes : la température à prendre en compte correspond à l’exercice de l’activité elle-même ; de fait, les températures extérieures ne sont pas prises en considération

 

– Fiche n°4 – Évaluation de l’exposition des travailleurs à la pénibilité, en lien avec la démarche globale d’évaluation des risques et, le cas échéant, les accords de branche étendus ou les référentiels professionnels de branche homologués

Cette fiche technique précise que l’évaluation des risques professionnels ou l’analyse effectuée par le CHSCT peuvent être utilisées pour réaliser l’évaluation de pénibilité.

Quant aux référentiels de branche, un employeur ne peut utiliser un référentiel d’une autre branche que pour des postes, métiers ou situations de travail qui ne seraient pas identifiés dans son référentiel professionnel.

 

– Fiche n° 5 – Le schéma pré-contentieux de contestation par le salarié de l’exposition aux facteurs de risques professionnels

Cette fiche rappelle les étapes à suivre en cas de contestation par un salarié de la déclaration faite par l’employeur.

 

– Fiche n° 6 – Les principes de la déclaration des facteurs d’exposition

Cette fiche détaille les échéances de la déclaration des facteurs d’exposition et les différentes procédures déclaratives des facteurs d’exposition (DADS, DTS et DSN).

Elle propose un tableau synthétique des dates de déclaration des expositions en fonction du support utilisé :

DADS (RG) DTS (RA) DSN (RG et RA)
Contrats qui demeurent en cours à la fin de l’année civile 31 janvier de l’année suivant l’exposition concernée 10 janvier de l’année suivant l’exposition (4ème année DTS) 5/15 janvier de l’année suivant l’exposition concernée
Contrats qui s’achèvent au cours de l’année civile 31 janvier de l’année suivant l’exposition concernée DTS du trimestre au cours duquel le contrat s’achève 5/15 du mois qui suit la fin du contrat

La fiche explicite ensuite les modalités déclaratives transitoires du fait de l’entrée en vigueur différée au 1er juillet 2016 des six facteurs d’exposition (Bruit, Vibrations, Postures pénibles, Manutention de charges, Agents chimiques dangereux, Températures extrêmes) :

1) en 2017, l’employeur effectue une seule déclaration que les facteurs soient entrés en vigueur avant le 1er juillet 2016 ou à cette date. Pour les contrats se terminant avant le 1er juillet 2016, l’employeur n’est pas tenu d’apprécier l’exposition aux six facteurs entrant en vigueur au 1er juillet 2016. L’instruction laisse donc à penser que l’évaluation de l’exposition aux six facteurs s’effectue rétroactivement au 1er janvier 2016 pour les contrats se poursuivant au-delà du 1er juillet 2016

2) en revanche, pour les 6 facteurs de pénibilité concernés, la cotisation additionnelle pénibilité ne sera appliquée que sur les rémunérations versées aux salariés concernés entre le 1er juillet et le 31 décembre 2016.

 

– Fiche n° 7 – Les principes du paiement des cotisations

La fiche présente les principes de déclaration et de paiement des cotisations de base et des cotisations additionnelles et les cas particuliers (cessation d’activité de l’entreprise, incidence d’une exonération de cotisations de sécurité sociale ou de l’application d’une assiette forfaitaire, incidence de la correction d’un facteur, sanctions en cas de manquement…)

 

– Fiche n° 8 – Modalités d’acquisition des points par les salariés

La fiche rappelle les conditions d’acquisition des points et les modalités de décompte de ceux-ci ainsi que les aménagements prévus (salariés nés avant le 1er juillet 1956, doublement des points pour les salariés pouvant être pénalisés pour 2016 du fait de l’entrée en vigueur décalée au 1er juillet 2016).

Pour information, il est à noter que cette instruction du 20 juin 2016 annule et remplace l’instruction DGT-DSS n°1 du 13 mars 2015.

 

Conclusion

Cette instruction version 2016 apporte des éclairages et précisions supplémentaires.

Les entreprises peuvent donc s’appuyer sur le Code du travail, les arrêtés parus et cette instruction, sans oublié les référentiels de branche, s’ils existent puisqu’il en reste beaucoup à paraitre, pour mener à bien la démarche.